Manipulation de l’Information par les Médias Américains
Le journal The New York Times du 10 décembre 2002 rapporte que l’administration Bush venait de décider de vendre de l’équipement militaire au gouvernement algérien. L’article en particulier, long de 614 mots, écrit par M. Steven R. Weisman, présente une image de l’Algérie très favorable pour le président Bouteflika.
Notez que M. Weisman n’a pas écrit son article à partir d’Alger pour décrire la réalité algérienne pour les lecteurs américains. Il le fait à partir de Washington car il ne veut surtout point que le public américain apprenne la vérité sur l’alliance de leur gouvernement avec les dictateurs.
Par contre, le journaliste s’assure de mentionner que Bush avait fait l’éloge de Bouteflika pour ses réformes économiques. Mais il oublie, délibérément, juste de dire où sont passés les résultats de ces soi-disant réformes.
Cet article excelle par l’absence de toute critique de forme ou de fond du gouvernement algérien car il ne doit surtout pas faillir à la justification de toute vente d’armes vers l’Algérie. Ainsi on pourra certainement dire que The New York Times est tout juste un autre El Moudjahid de tout va bien madame la marquis à la solde du département d’Etat.
Et comme par hasard, il faut attendre l’édition du 11 décembre 2002 pour qu’un timide petit article de 148 mots vienne rapporter « l’arrestation de 15 manifestants berbères parmi ceux parti à Alger marcher le 10 décembre, la journée mondiale des droits de l'Homme ». L’article, qui a été repris d’une dépêche de l’agence Reuters, se termine en indiquant que « la police a toujours relâché les gens arrêtés dans de pareilles circonstances ».
C’est à dire que l’agence Reuters n’a pas raté l’occasion de minimiser les violations des droits de l’Homme par les dictateurs. Si The New York Times n’a point mentionné les arrestations des délégués arrêtés tel Belaid Abrika depuis le 13 octobre, ni leur grève de la faim, c’est pour la simple raison que cela entacherait la bonne image du gouvernement algérien qu’il doit continuer à peindre.
La censure - il n'y a point d'autres mots - du journal The New York Times ne concerne pas seulement l’Algérie. Même lors de la marche contre la guerre en Iraq et qui a rassemblé plus de 100.000 personnes, le 26 novembre 2002, à Washington, The New York Times, dans son édition du soir du même jour, ne mentionne qu’une dizaine de milliers. D’autres types de medias telle la radio national NPR et l’agence d’information Associated Press avaient aussi fait mention du même chiffre. Il fallait que les organisateurs de la marche et les manifestants fassent pression par téléphone et par courrier électronique pour que The New York Times publie le 30 octobre un autre article qui, cette fois-ci, rehaussera le nombre en indiquant qu’entre 100.000 et 200.000 personnes y avaient participé. Durant un entretien avec Amy Goodman de la radio PACIFICA, le directeur de la radio NPR, M. Jeffrey Dvorkin, a justifié l’utilisation du nombre 10.000 par le fait que la journaliste de NPR était pressée de boucler son article et a donc utilisé le chiffre que l’Associated Press avait publié. En se passant ce petit nombre de 10.000 personnes entre elle, les médias géants ont bien indiqué une certaine constante dans leur désinformation.
Le professeur Noam Chomsky de l’Université de Harvard a bien décrit The New York Times. Reprenons sa comparaison mais avec El Moudjahid cette fois-ci.
Quelle est la différence entre les lecteurs d’ El Moudjahid et ceux du journal The New York Times ? Réponse: Les lecteurs d’El Moudjahid lisent les mensonges et ne les croient pas, ceux du New York Times les lisent et les croient.
En roulant pour la maffia politico-financière de Washington, The New York Times doit rester silencieux sur tout abus des droits de l’homme en Algérie. Et l’alliance de Bush avec les dictateurs d’Alger ne doit pas être une surprise car le Département d’Etat s’est déjà allié à d’autres dictateurs à travers le monde. Bien que cette liste soit longue, elle n’est point le sujet de cet article. Aidé par les medias à leurs soldes, le département d’état malheureusement marchande les valeurs de démocratie et liberté que les pères fondateurs comme Benjamin Franklin et George Washington ont inscrit dans la constitution américaine.
Au lieu de se présenter comme les défenseurs de la démocratie et des droits de l’Homme, le département d’état devrait être plus franc et annoncer dans un spot publicitaire sa solde de fin d’année 2002 : Donnez-nous votre pétrole pour faire fonctionner nos voitures, achetez nos armes et nos produits pour faire marcher nos usines, et vous obtiendrez notre silence gratuitement. Bouteflika a eu vent de cette solde lorsqu’il a été reçu à Washington le 12 juillet 2001 : Le silence du département d’Etat sur les violations des droits de l’Homme en Algérie, les derniers contrats de pétrole et du gaz, et cette prochaine vente d’armes sont là pour le confirmer.
On arrive donc à la lettre de Bouteflika publiée dans la rubrique « courrier des lecteurs » du journal The Washington Times du 25 novembre 2002. S’y attarder serait lui donner de l’importance. Plusieurs membres de la communauté amazighe ont été choqués de la lire. L’un d’eux y a vu un cas de « chita » exemplaire. La lettre intitulée «Un ami en Algérie » présente une Algérie harmonieuse qui combat le terrorisme et qui jouit d’une presse libre de critiquer le gouvernement. Evidemment, le Président ne mentionne pas les détails tel le code de la famille de 1984, ni les nouvelles dispositions du code pénal adoptées en 2001 contre la presse indépendante, ni les détenus politiques de Kabylie, ni l’amnistie accordée aux milliers de terroristes.
Dans sa missive, il reprend les mots d’un officier de la campagne anti-terroriste du département d’état qui avait qualifié le rôle de l’Algérie dans la campagne mondiale contre le terroriste de « magnifique.»
C’est dommage que les plus de 150.000 personnes qui ont perdu leur vie ne sont plus là pour témoigner de ce «rôle magnifique» de l’Algérie.
Le comble de l’ironie, c’est lorsque le président termine sa lettre par la phrase suivante « Ensemble, nous pouvons commencer de construire un nouveau monde de paix et de prospérité». C’est à croire que les Algériens baignent déjà dans une prospérité et une paix que leur cher président va maintenant répandre à travers le monde.