Tout est Calcul, Ma Fille
Dans le salon de son bureau villa, le général, enfoncé dans un fauteuil, sirote un verre de jus d'orange. Il me fit signe que je pouvais entamer l'entretien.
Je commence :
- Mon général, la région s'agite toujours!
- Les a- t- on laissé chanter et danser dans leur langue?
- Non, ils ne veulent plus danser ni chanter.
- Leur a- t- on donné une religion?
- Chaque village a une mosquée, mais ils n'y vont pas.
- Leur a- t- on fait un journal télévisé dans leur langue?
- Ils ne le regardent point.
- Leur a- t- on donné le vin et la bière?
- Ils ne soûlent plus.
- Leur a- t- on donné du pain?
- Ils ne mangent plus.
- Les a- t- on divisé avec les deux partis politiques?
- Ils ont des doutes aussi bien sur l'un que sur l'autre.
- Les a- t- on détruit avec une langue qui leur est étrangère?
- Ils la refusent.
- Que font- ils?
- Ils marchent dans les rues et demandent votre départ!
- Sont-ils armés ?
- Non ! Pourquoi ?
- Nous les taxerons de terroristes et nous pourrons faire usage du nouveau droit international.
- Dommage! Ils ne font que crier.
- Alors, le temps est de notre coté!
- Mais leurs amis reprennent leurs cris sous d'autres cieux.
- Des amis, nous en avons aussi et des plus puissants que les leurs sous les mêmes cieux.
Un planton interrompt l'entretien:
- Mon général, vos amis sous d'autres cieux sont tous arrivés!
- Fais les rentrer un par un!
Le planton sort et fait entrer les amis du général:
- L'américain Arwi d Aman
- Le belge André Hé la haut!
- L'italien Carlo Azul Campa
- L'ambassadeur de la Grande- Bretagne KiloGraHam M'Hand
Le général leur tint ce langage suivant:
- Messieurs, l'heure est solennelle.
Le silence de vos medias est votre gloire. Mes félicitations! Je ne croyais pas que vous pourriez le faire. J'étais prêt à croire au père Noël qu'à votre pouvoir de contrôler la soi- disant presse libre. Tous éclatèrent de rire. Ils étaient alignés en face du général, les mains jointes devant, l'écoutant avec attention.
- Voici des enveloppes de commandes d'armes et matériels militaires et des contrats de vente de gaz et de pétrole.
Ils avancèrent l'un après l'autre comme des élèves lors de la remise des prix de fin d'année, prirent chacun l'enveloppe qui lui était destinée et prirent congé du général et chantèrent tous en unisson, avant de disparaître, le refrain suivant:
"Vive le général de l'Algérie. Vive l'Algérie du Général"
S'adressant à moi, qui suis restée à l'écart, le général reprit :
- Tu n'as pas vu. Ils sont tous venus prendre leur cadeau de bonne conduite. Tu es surprise?
- Je n'en reviens pas !
- Pourquoi?
- Je pensais que les occidentaux avaient des principes.
- Leurs principes ne sont que des simples slogans. Il faut bien qu'ils mentent à leurs citoyens et donnent de l'espoir aux nôtres. Tu te souviens du socialisme avec lequel nous assommions le peuple qui venait juste de sortir de la guerre ?
- On n'en parle presque plus.
- Et bien aujourd'hui, le disque du socialisme est rayé. Heureusement, le libéralisme libérateur qui enrichira tout monde est là.
- Vous y croyez?
- L'important pour moi ce n'est pas ce que je crois ou ne crois pas. C'est d'y faire croire le peuple. S'il y croit, il se fera mener en bateau et mon travail sera plus facile.
- Et les autres comment font- ils dans leurs pays respectifs?
- Chacun a sa technique. Chez nous, il y a des khobzistes, chez eux, des steakistes. Tous branchés sur un réseau de transparence contrôlée?
- Transparence contrôlée? Là, vous me perdez.
- Lisez, ma fille. Tiens, le livre "les fils de l'amertume" la mentionne à la page 129. Une sorte de propagande qui ne dit pas son nom.
- Transparence, propagande?
- Une dernière étude aux USA a trouvé qu'un américain moyen passe 10 ans de sa vie près de la TV. Si tu ajoutes le temps qu'il passe assis sur un banc d'école, tu peux deviner le niveau de conditionnement possible. Alors, il suffit d'avoir les messages qu'il faut au moment où il les faut et là où il les faut. Tout est calcul et minuterie. Tu sais, ils sont très organisés.
- Et l'investissement privé ne sera- t- il pas générateur d'emplois chez nous, comme nos journaux le crient à tue- tête?
Eclatant de rire, le général hoche la tête:
- Ma fille, c'est un autre slogan qu'ils chantent pour acheter les quelques entreprises publiques telle la SONATRACH. Non seulement à cause du pétrole et du gaz, mais aussi à cause de l'excellente matière grise qu'elle recèle et que le pays a mis plus de quarante ans à former.
- On dit que les entreprises publiques sont trop lourdes et déficitaires et pas dynamiques.
- Si c'était vrai, comment expliquer la faillite des entreprises privées tel ENRON, WORLDCOM et bien d'autres. Mais ouvrez les yeux, bon dieu de bonsoir ! Juste avant d'aller en faillite, les hauts placés d'ENRON modifient les lois de ventes des actions pour qu'ils puissent vendre leurs actions au prix fort. Par contre les autres employés ne pouvaient pas vendre les leurs. Lorsqu'ils pouvaient, c'était trop tard, c'était le scandale, leurs actions ne valaient presque rien : Des économies quelques fois de 20 ans, comme ça parties en fumée.
- Mon général, vous voulez dire que les chefs d'ENRON avaient fait leur calcul?
- Maintenant, ma fille, tu commences à comprendre. WORLDCOM a carrément falsifié ses comptes en affichant des bénéfices alors que la perte était évaluée à 7.2 milliards de dollars. Tout est calcul, quelque fois des faux calculs, des calculs tout de même.
- Vous n'intervenez pas ?
- Moi, j'ai ma part du gâteau, c'est au peuple de se rendre compte.
- Merci, Mon général.
- Revenez le mois prochain, je serai de retour de mon voyage des USA.
- Bon voyage, Mon général…
Je commence :
- Mon général, la région s'agite toujours!
- Les a- t- on laissé chanter et danser dans leur langue?
- Non, ils ne veulent plus danser ni chanter.
- Leur a- t- on donné une religion?
- Chaque village a une mosquée, mais ils n'y vont pas.
- Leur a- t- on fait un journal télévisé dans leur langue?
- Ils ne le regardent point.
- Leur a- t- on donné le vin et la bière?
- Ils ne soûlent plus.
- Leur a- t- on donné du pain?
- Ils ne mangent plus.
- Les a- t- on divisé avec les deux partis politiques?
- Ils ont des doutes aussi bien sur l'un que sur l'autre.
- Les a- t- on détruit avec une langue qui leur est étrangère?
- Ils la refusent.
- Que font- ils?
- Ils marchent dans les rues et demandent votre départ!
- Sont-ils armés ?
- Non ! Pourquoi ?
- Nous les taxerons de terroristes et nous pourrons faire usage du nouveau droit international.
- Dommage! Ils ne font que crier.
- Alors, le temps est de notre coté!
- Mais leurs amis reprennent leurs cris sous d'autres cieux.
- Des amis, nous en avons aussi et des plus puissants que les leurs sous les mêmes cieux.
Un planton interrompt l'entretien:
- Mon général, vos amis sous d'autres cieux sont tous arrivés!
- Fais les rentrer un par un!
Le planton sort et fait entrer les amis du général:
- L'américain Arwi d Aman
- Le belge André Hé la haut!
- L'italien Carlo Azul Campa
- L'ambassadeur de la Grande- Bretagne KiloGraHam M'Hand
Le général leur tint ce langage suivant:
- Messieurs, l'heure est solennelle.
Le silence de vos medias est votre gloire. Mes félicitations! Je ne croyais pas que vous pourriez le faire. J'étais prêt à croire au père Noël qu'à votre pouvoir de contrôler la soi- disant presse libre. Tous éclatèrent de rire. Ils étaient alignés en face du général, les mains jointes devant, l'écoutant avec attention.
- Voici des enveloppes de commandes d'armes et matériels militaires et des contrats de vente de gaz et de pétrole.
Ils avancèrent l'un après l'autre comme des élèves lors de la remise des prix de fin d'année, prirent chacun l'enveloppe qui lui était destinée et prirent congé du général et chantèrent tous en unisson, avant de disparaître, le refrain suivant:
"Vive le général de l'Algérie. Vive l'Algérie du Général"
S'adressant à moi, qui suis restée à l'écart, le général reprit :
- Tu n'as pas vu. Ils sont tous venus prendre leur cadeau de bonne conduite. Tu es surprise?
- Je n'en reviens pas !
- Pourquoi?
- Je pensais que les occidentaux avaient des principes.
- Leurs principes ne sont que des simples slogans. Il faut bien qu'ils mentent à leurs citoyens et donnent de l'espoir aux nôtres. Tu te souviens du socialisme avec lequel nous assommions le peuple qui venait juste de sortir de la guerre ?
- On n'en parle presque plus.
- Et bien aujourd'hui, le disque du socialisme est rayé. Heureusement, le libéralisme libérateur qui enrichira tout monde est là.
- Vous y croyez?
- L'important pour moi ce n'est pas ce que je crois ou ne crois pas. C'est d'y faire croire le peuple. S'il y croit, il se fera mener en bateau et mon travail sera plus facile.
- Et les autres comment font- ils dans leurs pays respectifs?
- Chacun a sa technique. Chez nous, il y a des khobzistes, chez eux, des steakistes. Tous branchés sur un réseau de transparence contrôlée?
- Transparence contrôlée? Là, vous me perdez.
- Lisez, ma fille. Tiens, le livre "les fils de l'amertume" la mentionne à la page 129. Une sorte de propagande qui ne dit pas son nom.
- Transparence, propagande?
- Une dernière étude aux USA a trouvé qu'un américain moyen passe 10 ans de sa vie près de la TV. Si tu ajoutes le temps qu'il passe assis sur un banc d'école, tu peux deviner le niveau de conditionnement possible. Alors, il suffit d'avoir les messages qu'il faut au moment où il les faut et là où il les faut. Tout est calcul et minuterie. Tu sais, ils sont très organisés.
- Et l'investissement privé ne sera- t- il pas générateur d'emplois chez nous, comme nos journaux le crient à tue- tête?
Eclatant de rire, le général hoche la tête:
- Ma fille, c'est un autre slogan qu'ils chantent pour acheter les quelques entreprises publiques telle la SONATRACH. Non seulement à cause du pétrole et du gaz, mais aussi à cause de l'excellente matière grise qu'elle recèle et que le pays a mis plus de quarante ans à former.
- On dit que les entreprises publiques sont trop lourdes et déficitaires et pas dynamiques.
- Si c'était vrai, comment expliquer la faillite des entreprises privées tel ENRON, WORLDCOM et bien d'autres. Mais ouvrez les yeux, bon dieu de bonsoir ! Juste avant d'aller en faillite, les hauts placés d'ENRON modifient les lois de ventes des actions pour qu'ils puissent vendre leurs actions au prix fort. Par contre les autres employés ne pouvaient pas vendre les leurs. Lorsqu'ils pouvaient, c'était trop tard, c'était le scandale, leurs actions ne valaient presque rien : Des économies quelques fois de 20 ans, comme ça parties en fumée.
- Mon général, vous voulez dire que les chefs d'ENRON avaient fait leur calcul?
- Maintenant, ma fille, tu commences à comprendre. WORLDCOM a carrément falsifié ses comptes en affichant des bénéfices alors que la perte était évaluée à 7.2 milliards de dollars. Tout est calcul, quelque fois des faux calculs, des calculs tout de même.
- Vous n'intervenez pas ?
- Moi, j'ai ma part du gâteau, c'est au peuple de se rendre compte.
- Merci, Mon général.
- Revenez le mois prochain, je serai de retour de mon voyage des USA.
- Bon voyage, Mon général…